NZZ du 27 septembre 2010. Par Claudia WIRZ
La garde parentale conjointe devrait devenir la norme en cas de divorce.
Près de la moitié de tous les divorces concernent des enfants mineurs. Le Conseil fédéral travaille sur un projet de loi dans lequel la garde parentale partagée devrait devenir la règle.
En cas de litige, difficile de plaire à tout le monde. Ce truisme s’applique naturellement aussi aux divorces, en particulier lorsqu’il s’agit d’enfants mineurs. Il est alors non seulement important de réglementer les intérêts des époux qui divorcent, mais aussi de prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant. Comme les enfants ne veulent généralement pas que leurs parents se séparent, ce n'est pas toujours facile.
Du possible à la règle
La garde parentale partagée peut être une solution possible à ce dilemme. Il part du principe que la responsabilité parentale partagée ne doit pas nécessairement cesser après un divorce, mais peut se poursuivre si les parents sont capables de communiquer entre eux. La possibilité d'une garde parentale conjointe était au cœur de la révision de la loi sur le divorce de 2000.
Depuis lors, les parents concernés peuvent demander la garde conjointe en cas de divorce s'ils sont d'accord sur ce point. C'est le cas d'une proportion importante. En 2009, 13'789 enfants mineurs au total ont été concernés par un divorce dans toute la Suisse. En 7707, la garde revenait à la mère, en 616 au père et en 5432 à la mère et au père ensemble. Les différences cantonales sont parfois assez importantes (voir graphique).
Étant donné qu'une demande conjointe est la condition préalable à l'octroi de la garde partagée, la réglementation actuelle peut en fait équivaloir à une sorte de droit de veto pour l'un des parents - généralement la mère. Le Conseil fédéral souhaite donc faire de la garde parentale partagée la règle. Le message sur la modification correspondante du Code civil devrait être présenté cet automne.
Cependant, le changement prévu est tout sauf controversé. C'est notamment le Centre des femmes de Zurich qui le rejette avec véhémence. L'organisation écrit que la proposition repose sur une image idéale de l'harmonie parentale qui diffère grandement de la réalité. Elle nie que la garde partagée puisse apaiser les parents en conflit. Elle s’attend plutôt à ce que si cela devenait automatique, cela rendrait la vie du parent qui s’en occupe le plus difficilement, ce qui affecterait principalement les mères. L'idée n'a en aucun cas été accueillie aussi positivement que le prétendait le Conseil fédéral, affirme la présidente Irène Meier. L'association des juges a également exprimé des critiques. La Fédération suisse des avocats elle-même s'y est opposée dans un plaidoyer enflammé (NZZ du 2 septembre 2009).
Alexandra Rumo-Jungo, professeur de droit à Fribourg, voit la question différemment. Elle considère que la garde partagée est en règle générale meilleure que la formule actuelle. Ce qu’elle critique à propos de la réglementation actuelle n’est pas seulement le droit de veto de facto ; Au contraire, le système de demande conjointe encourage toutes sortes de « querelles contre nature » entre époux, ce qui n’est pas dans l’intérêt de l’enfant. Ce serait mieux, pense-t-elle, si la garde n'était même pas un sujet de discorde.
Andrea Hauri, de la Fondation Protection de l'enfance Suisse, déplore à son tour que la proposition du Conseil fédéral se concentre trop sur l'égalité entre les pères et les mères, tandis que la protection de l'enfance est négligée. En principe, la fondation n'a en principe aucune objection à la garde parentale conjointe, mais un contrôle de protection de l'enfance doit être effectué dans chaque cas individuel pour savoir si cette option est la meilleure pour l'enfant. Cela inclut l’écoute des enfants concernés. Les enfants jouissent déjà du droit d’être entendus, mais Hauri estime que les tribunaux se facilitent souvent la tâche.
Optimiser au lieu de gagner
Le juge Thomas Hiltpold du tribunal d'arrondissement X de Thoune s'occupe des divorces depuis 1997. Il ne considère pas que la modification proposée au Code civil soit obligatoire. Toute personne remplissant les conditions de la garde partagée peut l’obtenir aujourd’hui, dit-il. La tendance est à la hausse. Si la relation entre les parents est tendue par une rupture massive, la garde conjointe est de toute façon hors de question. L'expérience montre à Hiltpold que la réglementation formelle de la garde des enfants ne joue pas un rôle majeur. Les enfants veulent des conditions claires, des relations vécues et ils se satisfont également de droits de visite réglementés qui ont fait leurs preuves pendant la période de séparation. Selon Hiltpold, plus le temps passe, moins la forme juridique de garde joue un rôle. Le contenu est crucial pour toutes les personnes concernées.
La psychologue Heidi Simoni de l'Institut Marie Meierhofer pour l'enfance et la professeure de droit zurichoise Andrea Büchler ont examiné l'influence de la pratique juridique sur les enfants, les mères et les pères. Les résultats confirment l'expérience de Hiltpold. Quelques années après le divorce, la majorité des personnes concernées sont satisfaites de la vie. Cependant, 75 pour cent des pères sans garde et un tiers des mères avec garde partagée vivent des conflits.
Heidi Simoni plaide donc pour une forme de garde à la fois juridiquement harmonieuse et adaptée à un usage quotidien. Simoni estime qu'il est erroné qu'un parent soit privé de l'autorité parentale uniquement en raison d'un changement d'état civil, c'est-à-dire d'un divorce. Au lieu de cela, dans l'intérêt supérieur de l'enfant, les parents devraient être obligés de présenter au juge un accord global expliquant quel parent peut assumer quelles responsabilités en matière de soins et de sécurité matérielle. Les enfants seraient aidés, dit-elle, si la gestion de leurs préoccupations consistait moins à gagner et à perdre qu'à trouver des solutions quotidiennes. La mise en œuvre des droits de participation des enfants est également au cœur de Simoni.